La loi Climat et Résilience et le contexte économique morose se présentent comme un défi pour les acteurs de l’immobilier. Thibault Le Treut invite à voir cette situation comme le fondement d’une nouvelle expansion économique durable pour le secteur.
Avec un parc immobilier français vieillissant, à la consommation énergétique délirante, s’il est un domaine dans lequel il est urgent d’agir, c’est bien celui de l’immobilier. Votée en 2021, la loi Climat et Résilience a déjà mis fin en début d’année à la location des passoires thermiques et impose des obligations en matière de rénovation énergétique pour les bâtiments existants. Plutôt que de les percevoir comme une charge, il est impératif pour le secteur de saisir cette occasion pour faire sa part dans la lutte contre le réchauffement climatique et lutter contre le mal-logement.
La profession n’a pas attendu une évolution du cadre juridique pour entamer sa transition énergétique : la plupart des logements récemment construits sont exemplaires en termes de consommation d’énergie et d’impact environnemental. Le chantier reste néanmoins de taille.
La France métropolitaine compte 36,2 millions de logements, dont 12,6 millions de logements construits ou réhabilités depuis 1982. Cela signifie qu’un tiers des logements pour particuliers en France sont plus que vieillissants, et que le dernier tiers doit lui aussi connaître certaines lacunes énergétiques voire de sécurité.
Les clés d’une refondation
L’ambition de la loi Climat et Résilience est de participer à l’objectif de neutralité carbone porté par la France à horizon 2050 , alors que le bâtiment représente 44 % de l’énergie consommée en France et 22 % de ses émissions de gaz à effet de serre. Ainsi, depuis janvier 2023, tous les logements ne respectant pas le seuil de consommation énergétique en énergie finale de 450 kWh/an seront qualifiés comme logements indécents pour les baux nouveaux ou renouvelés.
La loi Climat et Résilience est une occasion en or de combler ce retard, en plus d’ouvrir la voie à de nouvelles opportunités économiques.
Face à l’urgence climatique, mais aussi au contexte économique et social tendu qui entraîne une hausse sans précédent des prix de l’énergie , il est plus que jamais nécessaire pour le secteur immobilier de se transformer pour bâtir un avenir et une société durable.
En aidant les propriétaires à répondre aux exigences de la loi et à améliorer l’efficacité énergétique de leurs biens, cet objectif est largement atteignable. Et selon une étude récente , plus de 60 % des propriétaires bailleurs se disent prêts à investir dans des travaux de rénovation énergétique pour réduire leur empreinte carbone et réaliser des économies à long terme.
La transition énergétique dans le secteur a été lente, en grande partie en raison de la progression tardive de la transformation numérique. La loi Climat et Résilience est une occasion en or de combler ce retard, en plus d’ouvrir la voie à de nouvelles opportunités économiques.
Opportunités de croissance
En intégrant les avancées technologiques telles que la collecte de données, les outils de mesure avancés, les objets connectés, ainsi que la simulation grâce au jumeau numérique, le secteur de la rénovation énergétique peut enfin exploiter ces opportunités pour réaliser des progrès significatifs.
Avec une croissance soutenue du secteur de la PropTech en France (34 % d’augmentation des flux de financement entre 2021 et 2022) et environ 20 millions de logements à rénover d’ici 2050, le marché de la rénovation énergétique devrait connaître une forte croissance à l’avenir . En 2017, il représentait déjà près de 28 milliards d’euros. Cette croissance offre un terrain fertile pour une nouvelle catégorie d’acteurs et de champions dans le secteur. En investissant massivement dans les technologies et les solutions innovantes, ces acteurs peuvent saisir une part significative de cette expansion.
Plutôt que d’être perçue comme une simple contrainte, la prise en compte des enjeux environnementaux, y compris par les législateurs, offre une occasion sans précédent d’innover, aussi bien pour de nouveaux acteurs que pour les entreprises historiques de l’immobilier. Propriétaires, locataires, investisseurs sont en effet en demande de clarification, d’accompagnement, de produits et services qui s’adaptent à cette nouvelle donne, et les différents acteurs du secteur immobilier sont prêts à leur répondre, pour faire de la contrainte un marchepied vers un futur plus responsable.
Thibault Le Treut est le président-directeur général et cofondateur de Check and Visit.
Thibault Le Treut “Les Echos”